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Échevin d’après le Dictionnaire encyclopédique de la noblesse de France Nicolas Viton de Saint-Allais — Paris, 1816
ÉCHEVIN, subst. masc., c’était le titre que l’on donnait anciennement aux assesseurs ou conseillers des comtes.
Les Échevins étaient appelés Scabini, Scabinii ou Scabinei, et quelquefois Scavini, Scabiniones, ou Scapiones : on les appelait aussi indifféremment racinburgi ou rachinburgi ce dernier nom fut usité pendant toute la première race, et en quelques lieux jusque sur la fin de la seconde.
On leur donnait aussi quelquefois les noms de sagi, barones, ou viri sagi, et de senatores.
Le terme de Scabini, qui était leur nom le plus ordinaire, et d’où l’on a fait en français Échevin, vient de l’allemand, schabin ou schehen, qui signifie juge ou homme savant.
Quelques-uns ont néanmoins prétendu que ce mot tirait son étymologie d’eschever, qui en vieux langage signifie cavere ; et que l’on a donné aux Échevins ce nom, à cause des soins qu’ils prenaient de la police des villes ; mais comme le nom latin de Scabini est plus ancien que le mot français Échevins, il est plus probable que Scabini est venu de l’allemand schabin ou schehen, et que de ces mêmes termes, ou du latin Scabini, on a fait Échevin, qui ne diffère guère que par l’aspiration de la lettre s, et par la conversion du h en v.
Le moine Marculphe qui écrivait vers l’an 660, sous le règne de Clovis II, fait mention dans ses formules des Échevins qui assistaient le comte ou son viguier, vigarius, c’est-à-dire lieutenant, pour le jugement des causes. Ils étaient nommés tantôt Scabini, tantôt rachinburgi. Aigulphe, comte du palais sous le même roi, avait pour conseillers les gens d’épée comme lui, qu’on nommait Échevins du palais, Scabini palatii. Il est aussi fait mention de ces Échevins du palais dans une chronique du temps de Louis-le-Débonnaire, et dans une charte de Charles-le-Chauve.
Les capitulaires de Charlemagne, des années 788, 803, 805 et 809 ; de Louis-le-Débonnaire en 819, 829 ; et de Charles-le-Chauve, des années 864, 867 et plusieurs autres, font aussi mention des Échevins en général, sous le nom de Scabini, et suivant ces capitulaires et plusieurs anciennes chroniques, les Échevins étaient élus par le magistrat même avec les principaux citoyens.
Il paraît que dans la ville de Paris la fonction des Échevins qui existaient dès le temps de la première et de la seconde race, continua encore sous la troisième jusque vers l’an 1251, ils étaient nommés par le peuple et présidés par un homme du roi : ils portaient leur jugement au prévôt de Paris, lequel alors ne jugeait point. Ces prévôts n’étaient que des fermiers de la prévôté, et dans les prévôtés ainsi données à ferme, comme c’était alors la coutume, c’était les Échevins qui taxaient les amendes. Les Échevins de Paris cessèrent de faire la fonction de juges ordinaires, lorsque Étienne Boileau fut prévôt de Paris, c’est-à-dire en 1251 ; alors ils mirent à leur tête le prévôt des marchands ou de la confrérie des marchands, dont l’institution remontait au temps de Louis VII.
Ce fut sous son règne, en 1170, qu’une compagnie des plus riches bourgeois de la ville de Paris y établit une confrérie des marchands de l’eau, c’est-à-dire fréquentant la rivière de Seine, et autres rivières affluentes. Ils achetèrent des religieuses de Haute-Bruyère une place hors la ville qui avait été à Jean Popin, bourgeois de Paris, lequel l’avait donnée à ces religieuses. Ils en formèrent un port appelé le port Popin ; c’est à présent un abreuvoir du même nom. Louis le Jeune confirma cette acquisition et établissement par des lettres de 1170 ; Philippe Auguste donna aussi quelques temps après des lettres pour confirmer le même établissement et régler la police de cette compagnie.
Les officiers de cette compagnie sont nommés dans un arrêt de la Chandeleur en 1228 (au registre præpositi mercatorum aquæ olim) ; dans un autre de la Pentecôte, en 1273, ils sont nommés Scabini, et leur chef magister Scabinorum. Dans le recueil manuscrit des ordonnances de police de saint Louis ils sont dits li prévôt de la confrérie des marchands et li Échevins de la marchandise ; li jurés de la confrérie des marchands.
Depuis ce furent des officiers municipaux établis dans plusieurs villes, bourgs et autres lieux, pour avoir soin des affaires de la communauté : en quelques endroits ils avaient aussi une juridiction et autres fonctions plus ou moins étendues, selon leurs titres et possession, et suivant l’usage du pays.
Loyseau, en son Traité des offices, liv. V, chap. vij, dit que les Échevins étaient magistrats, du moins municipaux, de même que ceux que les Romains choisissaient entre les décurions ; il les compare aussi aux édiles, et aux officiers que l’on appelait Defensores civitatum ; et en effet les fonctions de ces officiers avaient bien quelque rapport avec celles d’Échevins, mais il faut convenir que ce n’était pas précisément la même chose, et que le titre et les fonctions de ces sortes d’officiers, tels qu’ils étaient établis parmi nous, étaient absolument inconnus aux Romains ; l’usage en fut apporté d’Allemagne par les Francs, lorsqu’ils firent la conquête des Gaules. Voyez Anoblissement, Maire.
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